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By Muriel Motte

La banque Raphaël, « boutique » en vogue des affaires familiales

Les faits : Créée il y a trois ans par deux anciens associés-gérants de Rothschild
& Co, Raphaël Financial Advisory se focalise sur les sociétés entrepreneuriales
et familiales. Un segment en effervescence après les réformes fiscales du gouvernement
d’Édouard Philippe.
Dans le petit monde du LBO français, les deals à 1 milliard d’euros ne sont
pas légion. Conseiller exclusif du fonds Ardian dans sa reprise, il y a quelques
mois, de l’entreprise familiale DRT, la banque d’affaires Raphaël Financial Advisory
s’est, d’un coup, bien installée dans le paysage.
Créée en 2015 par deux quadragénaires, Benoit O’Mahony et Florent Haïk, anciens
associés gérants du pôle mid-market de Rothschild & Co où ils ont passé
plus de dix ans, Raphaël Financial Advisory a fait des sociétés entrepreneuriales
et familiales sa spécialité. « Notre coeur de métier est de les conseiller
lors de leur transmission. On parle souvent d’aide à la création d’entreprise, la
transmission sort des radars, or c’est un moment de fragilité », constate Benoit
O’Mahony. Le marché potentiel est vaste : bon an, mal an environ 15 000 PME
et ETI représentant plus d’un million d’emplois changent de mains.
Pour cela il existe tout un écosystème d’avocats spécialisés, de banques, de
fonds de capital-transmission et autres sociétés de conseil. Encore faut-il savoir
à quelle porte frapper. « Le conseil est un monde de personnes et de personnalités.
Les marques et les réseaux peuvent être un atout, mais les entrepreneurs
veulent surtout avoir affaire à des individualités de confiance.
Le bouche-à-oreille est très important », explique Florent Haïk. « Nous nous
sommes lancés en étant convaincus que les clients ont besoin d’un conseil à
haute valeur ajoutée. Tout le monde le dit, mais beaucoup de maisons laissent
des “juniors” dérouler des recettes toutes faites », enchaîne Benoit O’Mahony.
Trois ans plus tard leur petite entreprise compte une dizaine de collaborateurs,
et a pris l’habitude de boucler un deal par mois, des dossiers compris entre 20
millions et… 1 milliard d’euros.
« Nous avons vocation à grandir bien sûr, mais ce métier est très qualitatif.
Les “boutiques” sont mieux adaptées au besoin de confidentialité et évitent
plus facilement les conflits d’intérêt. Quoi qu’il arrive, nous resterons dans
le conseil sur-mesure, » poursuit Benoit O’Mahony. L’environnement est porteur.
« Le marché de la transmission d’entreprise s’est élargi à une nouvelle catégorie
d’investisseurs, des cadres dirigeants qui veulent prendre le tournant
de l’entrepreneuriat et viennent nous voir pour acheter des affaires. C’était
beaucoup moins vrai il y a quelques années », constate Florent Haïk.
Intérêts étrangers. A cela s’ajoute « l’effet Macron » qui, dans la banque d’affaires
est synonyme du retour des capitaux étrangers et du déploiement de
nouvelles équipes dans l’Hexagone. Symbole s’il en est, Jacques Veyrat patronfondateur
du fonds Impala et président du conseil d’administration de Fnac-
Darty, a été nommé en janvier dernier Senior Advisor pour les activités en France du fonds d’investissement KKR. Deux mois plus tard, c’est Xavier Niel,
patron fondateur et premier actionnaire de Free, qui était nommé administrateur
indépendant du géant américain. Dans la perspective de futures opérations
d’envergure, spécule-t-on à Paris.
Concrètement, « sur nos dossiers, nous enregistrons 30 % d’intérêts supplémentaires
de la part d’investisseurs étrangers, constate Florent Haïk. Qu’il
s’agisse de fusions-acquisitions ou d’opérations de LBO, la part de la France
a bondi. Récemment, les fonds d’investissement spécialisés dans la tech française
ont même levé plus d’argent qu’au Royaume-Uni ». Et le Brexit est un
atout. « Nous recevons aujourd’hui beaucoup plus de CV de Londres. Cela ne
nous intéresse pas car nous cherchons plutôt des spécialistes du “mid-market”
français, sourit Benoit O’Mahony. Mais c’est le signe que l’incertitude commence
à peser sérieusement à la City. »
L’ambiance est différente dans l’Hexagone, peut-être et surtout grâce à la réforme
fiscale, avec le remplacement de l’ISF par l’impôt sur la fortune immobilière
et l’instauration de la flat tax sur le capital. « Jusqu’à présent, les considérations
fiscales prévalaient dans les dossiers de transmission, explique Benoit
O’Mahony. Cette contrainte n’empêchait pas les opérations mais elle poussait
trop souvent les entrepreneurs à les réaliser dans un mauvais timing. Pour profiter
d’une « bonne fenêtre » justement. Aujourd’hui, les opérations peuvent
se faire au moment opportun. On le voit déjà, les gens s’adaptent assez vite.
Des clients sont prêts à se lancer dans des deals qu’ils refusaient encore récemment
». En quelques mois, tout a changé.