La Logistique accélère sa mue digitale
Déjà mis sous pression par l’explosion du e-commerce, les professionnels de la logistique ont été contraints de se réinventer en accéléré à la suite de la crise sanitaire. En plus de renforcer les positions d’Amazon et consorts, les confinements ont complexifié la tâche des transporteurs, mis en lumière des risques de sécurité et accru l’incertitude économique. Pour répondre à ces problématiques, la filière hâte sa digitalisation.
Amazon n’en demandait pas tant. Le géant américain du e-commerce a trouvé avec la crise sanitaire une occasion en or et inédite d’éprouver son modèle et de consolider sa place de leader sur son marché. Sa logistique sans faille lui a permis de passer outre les restrictions et d’assurer un nombre de livraisons qui s’annonce encore record cette année, faisant du même coup augmenter la pression sur chacun des maillons de la chaîne et des professionnels du transport, de l’entreposage ou de la gestion de flux. « Depuis une petite dizaine d’années, dans le sillage de l’essor d’Amazon, nos métiers ont connu deux évolutions majeures, témoigne Thomas Mortier, président de Staci, entreprise de logistique actuellement détenue par Ardian et passée par les portefeuilles de Cobepa et d’ICG. La première est l’omnicanalité des flux : un logisticien comme Staci, qui était historiquement plutôt spécialisé dans la gestion de flux B2B, doit aujourd’hui savoir gérer à la fois du B2B, du B2C et même du B2B2C, pour livrer les entrepôts des e-commerçants qui ont besoin d’avoir à disposition l’intégralité du catalogue et revendent ensuite aux clients finaux. Cela nécessite de faire évoluer nos process, d’adapter nos chaînes de colisage pour être capables de traiter des commandes de toutes les tailles. Le second changement tient à l’absence accrue de visibilité au-delà du court terme. Il devient très compliqué de prévoir les pics de demande qui ne répondent plus autant qu’avant à la saisonnalité et aux grands événements comme Noël ou la Saint-Valentin. Sur cette base, le Covid a contribué à modifier en profondeur nos repères. »
Système sous pression
À bien des égards, la crise sanitaire a certes accéléré mais surtout parachevé une bascule du marché largement entamée au gré des crises géopolitiques des derniers mois, des soubresauts protectionnistes et des changements plus structurels de modes de consommation vers les circuits courts et les produits locaux… « Nous avons vu les premières disruptions arriver sur le marché du transport de personnes avec le VTC, puis la démocratisation du commerce en ligne et le développement d’acteurs comme Uber Freight aux États-Unis dans les années 2010. À la même époque, nous avons observé un recours accru à la robotique en Israël pour gérer les biens périssables ou non, et l’installation de plus en plus fréquente d’entrepôts proches des bassins de consommation, explique Julien-David Nitlech, managing partner chez Iris Capital. Tous ces mouvements reposaient sur le constat que le marché mondial de la logistique est énorme et que le système est sous pression permanente. L’enjeu était donc de répondre à trois problématiques : sa modernisation, son optimisation et sa sécurisation. »
Dans une étude publiée au début de décembre et intitulée « Une nouvelle ère pour les chaînes logistiques », KKR met lui aussi en lumière le changement de paradigme en quatre dimensions qu’a subi le monde de la supply chain. « La façon traditionnelle de penser la logistique reposait sur quatre dynamiques fondamentales qui ne suffisent plus aujourd’hui à comprendre le secteur. Le premier pilier consistait en la prédominance du commerce de biens au niveau mondial. Aujourd’hui, les services et les données, qui répondent à des logiques locales, mais aussi les jeux vidéos, la publicité ou le cloud, qui défient les frontières, sont les moteurs principaux du commerce global. (…) Le deuxième pilier était le rôle de l’Asie : les entreprises y produisaient et exportaient alors qu’il s’agit maintenant de s’adresser aux consommateurs de cet immense marché, détaillent les experts de KKR. La troisième thématique est celle de la mondialisation qui devait s’affermir, entraînant ainsi un commerce toujours plus important, alors qu’elle tend plutôt à éclater au profit de barrières protectionnistes. Enfin, le quatrième acquis était que le consommateur ne se préoccupe que du prix. Certes, il reste un critère important, mais la demande pour des business plus durables, prenant en compte l’intégralité des parties prenantes et plus seulement les actionnaires, est en croissance. Dans le même temps, les consommateurs veulent toujours plus de réactivité, d’expérience client et de personnalisation. »
Digitaliser pour reconstruire
Pour s’adapter à ces bouleversements, le recours à plus d’automatisation et de technologies numériques s’impose. « Notre métier se digitalise avant tout sur la partie administrative et la gestion de la relation client, notamment pour gérer l’immédiateté, atteste Thomas Mortier, président de Staci. En aval, nous déployons de plus en plus de solutions de business intelligence destinées à donner au client une vision claire et en temps réel de son activité en se basant sur les très nombreuses données auxquelles nous avons accès. Le logisticien a ce rôle de donner de la visibilité sur les flux, leur répartition régionale, les Kpi’s, l’évolution des ratios de répartition des flux par typologie de commandes… »
« Le digital est clé pour être capable d’adapter les chaînes logistiques aux standards imposés par le e-commerce et Amazon, confirme Florent Haïk, managing partner chez Raphaël Financial Advisory, conseil M&A à la manœuvre pour le dernier LBO sur Staci, et bon connaisseur du secteur. Certes, ce marché tire la croissance et les acteurs de la logistique en ont bénéficié en matière de volume d’activité. Toutefois, ils n’ont pas forcément amélioré leur rentabilité du fait de la forte pression concurrentielle. Il y a donc un enjeu d’amélioration de leur productivité et d’avantage compétitif à répondre au plus vite aux nouveaux modes de consommation, notamment le “on-demand”. Cela nécessite de savoir à tout moment où se trouvent les camions, de tracer les palettes sur le parcours, de recourir à l’intelligence artificielle pour planifier et prédire la demande… »
Matthieu Bonamy, managing partner chez Idinvest, complète : « Le moment que nous vivons est particulièrement intéressant pour le secteur de la logistique, car il souligne son besoin accru de résilience. Toutes les entreprises doivent revoir leur gestion de la supply chain et sont confrontées à des problématiques de fournitures, de livraisons… De ce fait, ce que l’on avait identifié comme une opportunité de business portée par le digital va bien au-delà : celui-ci est réellement un facteur de résilience pour le secteur et doit lui permettre de repartir de l’avant en s’adaptant à la nouvelle donne post-Covid. »
La conviction des investisseurs est que cette reconstruction se fera brique par brique. Ainsi, même les plus petites entreprises pourront constituer à un coût abordable leurs dispositifs logistiques de dernière génération sans être forcés d’intégrer l’ensemble des composantes comme peut le faire un géant du e-commerce.
« Cette capacité à recréer la chaîne de bout en bout en s’appuyant sur des tiers est de plus en plus cruciale tant le niveau d’exigence augmente sous l’impulsion des plus gros acteurs, poursuit Matthieu Bonamy. Cela a donc du sens d’être positionné sur l’ensemble de la filière, du transport à la livraison du dernier kilomètre en passant par l’entreposage. C’est le sens de nos investissements dans OnTruck, pour éviter de faire rouler des camions vides, dans Shipfix pour l’optimisation des flux de transport par bateaux ou encore dans Spacefill pour la gestion des entrepôts. »
À bien des égards, la crise sanitaire a certes accéléré mais surtout parachevé une bascule du marché largement entamée au gré des crises géopolitiques des derniers mois, des soubresauts protectionnistes et des changements plus structurels de modes de consommation vers les circuits courts et les produits locaux… « Nous avons vu les premières disruptions arriver sur le marché du transport de personnes avec le VTC, puis la démocratisation du commerce en ligne et le développement d’acteurs comme Uber Freight aux États-Unis dans les années 2010. À la même époque, nous avons observé un recours accru à la robotique en Israël pour gérer les biens périssables ou non, et l’installation de plus en plus fréquente d’entrepôts proches des bassins de consommation, explique Julien-David Nitlech, managing partner chez Iris Capital. Tous ces mouvements reposaient sur le constat que le marché mondial de la logistique est énorme et que le système est sous pression permanente. L’enjeu était donc de répondre à trois problématiques : sa modernisation, son optimisation et sa sécurisation. »
Dans une étude publiée au début de décembre et intitulée « Une nouvelle ère pour les chaînes logistiques », KKR met lui aussi en lumière le changement de paradigme en quatre dimensions qu’a subi le monde de la supply chain. « La façon traditionnelle de penser la logistique reposait sur quatre dynamiques fondamentales qui ne suffisent plus aujourd’hui à comprendre le secteur. Le premier pilier consistait en la prédominance du commerce de biens au niveau mondial. Aujourd’hui, les services et les données, qui répondent à des logiques locales, mais aussi les jeux vidéos, la publicité ou le cloud, qui défient les frontières, sont les moteurs principaux du commerce global. (…) Le deuxième pilier était le rôle de l’Asie : les entreprises y produisaient et exportaient alors qu’il s’agit maintenant de s’adresser aux consommateurs de cet immense marché, détaillent les experts de KKR. La troisième thématique est celle de la mondialisation qui devait s’affermir, entraînant ainsi un commerce toujours plus important, alors qu’elle tend plutôt à éclater au profit de barrières protectionnistes. Enfin, le quatrième acquis était que le consommateur ne se préoccupe que du prix. Certes, il reste un critère important, mais la demande pour des business plus durables, prenant en compte l’intégralité des parties prenantes et plus seulement les actionnaires, est en croissance. Dans le même temps, les consommateurs veulent toujours plus de réactivité, d’expérience client et de personnalisation. »
Digitaliser pour reconstruire
Pour s’adapter à ces bouleversements, le recours à plus d’automatisation et de technologies numériques s’impose. « Notre métier se digitalise avant tout sur la partie administrative et la gestion de la relation client, notamment pour gérer l’immédiateté, atteste Thomas Mortier, président de Staci. En aval, nous déployons de plus en plus de solutions de business intelligence destinées à donner au client une vision claire et en temps réel de son activité en se basant sur les très nombreuses données auxquelles nous avons accès. Le logisticien a ce rôle de donner de la visibilité sur les flux, leur répartition régionale, les Kpi’s, l’évolution des ratios de répartition des flux par typologie de commandes… »
« Le digital est clé pour être capable d’adapter les chaînes logistiques aux standards imposés par le e-commerce et Amazon, confirme Florent Haïk, managing partner chez Raphaël Financial Advisory, conseil M&A à la manœuvre pour le dernier LBO sur Staci, et bon connaisseur du secteur. Certes, ce marché tire la croissance et les acteurs de la logistique en ont bénéficié en matière de volume d’activité. Toutefois, ils n’ont pas forcément amélioré leur rentabilité du fait de la forte pression concurrentielle. Il y a donc un enjeu d’amélioration de leur productivité et d’avantage compétitif à répondre au plus vite aux nouveaux modes de consommation, notamment le “on-demand”. Cela nécessite de savoir à tout moment où se trouvent les camions, de tracer les palettes sur le parcours, de recourir à l’intelligence artificielle pour planifier et prédire la demande… »
Matthieu Bonamy, managing partner chez Idinvest, complète : « Le moment que nous vivons est particulièrement intéressant pour le secteur de la logistique, car il souligne son besoin accru de résilience. Toutes les entreprises doivent revoir leur gestion de la supply chain et sont confrontées à des problématiques de fournitures, de livraisons… De ce fait, ce que l’on avait identifié comme une opportunité de business portée par le digital va bien au-delà : celui-ci est réellement un facteur de résilience pour le secteur et doit lui permettre de repartir de l’avant en s’adaptant à la nouvelle donne post-Covid. »
La conviction des investisseurs est que cette reconstruction se fera brique par brique. Ainsi, même les plus petites entreprises pourront constituer à un coût abordable leurs dispositifs logistiques de dernière génération sans être forcés d’intégrer l’ensemble des composantes comme peut le faire un géant du e-commerce.
« Cette capacité à recréer la chaîne de bout en bout en s’appuyant sur des tiers est de plus en plus cruciale tant le niveau d’exigence augmente sous l’impulsion des plus gros acteurs, poursuit Matthieu Bonamy. Cela a donc du sens d’être positionné sur l’ensemble de la filière, du transport à la livraison du dernier kilomètre en passant par l’entreposage. C’est le sens de nos investissements dans OnTruck, pour éviter de faire rouler des camions vides, dans Shipfix pour l’optimisation des flux de transport par bateaux ou encore dans Spacefill pour la gestion des entrepôts. »
Dans d’autres segments de la chaîne logistique, comme les commissionnaires de transport, la digitalisation comme outil de modernisation apparaît moins évidente ou systématique. « Nous sommes dans un métier d’intermédiation, puisqu’un commissionnaire organise l’import/export de marchandises et gère toute la prestation de transport, y compris le dédouanement éventuel. Au global, l’aspect humain reste essentiel, notamment la relation commerciale qui est évidemment clé dans ce métier, signale Stéphane Perriquet, associé chez 21 Invest, actionnaire majoritaire de LV Overseas depuis 2019. Cela dit, le potentiel de digitalisation est très important sur les process, qui consomment une part importante des ressources et seront de plus en plus automatisés. Nous y travaillons afin de gagner en efficacité et en productivité. Certaines start-up émergent également en proposant une prestation largement digitalisée ; leur taille est encore limitée, mais elles pourraient jouer un rôle plus important à terme. »
Spacefill, Exotec et les autres…
« Pour une entreprise, créer une chaîne logistique demande beaucoup de temps et d’argent. Dans le même temps, nous observons une prise de conscience croissante qu’une supply chain efficace peut vite devenir un élément différenciant très puissant d’un point de vue stratégique et de fidélisation des clients. Les dirigeants regardent de plus en plus les coûts induits par une expérience clients dégradée plutôt que les coûts directs liés à la supply chain, reprend Maxime Huzar, cofondateur de Spacefill. Reste que ce n’est pas toujours évident de savoir sur quels partenaires s’appuyer et c’est précisément là que nous souhaitons nous positionner : en plus de notre marketplace d’entrepôts, qui met en relation des entreprises recherchant des capacités de stockage avec des exploitants d’entrepôts aptes à les accueillir, nous souhaitons développer nos fonctionnalités de facturation, de mise en place des procédures opérationnelles permettant de s’assurer que les colis sont bien traités… » Créé en 2018, Spacefill a levé 7 millions d’euros à l’automne dernier auprès d’Idinvest, de business angels comme les fondateurs d’un autre acteur du secteur, Transporteon, et de ses investisseurs historiques, La Famiglia et Financière Saint James.
Spacefill, Exotec et les autres…
« Pour une entreprise, créer une chaîne logistique demande beaucoup de temps et d’argent. Dans le même temps, nous observons une prise de conscience croissante qu’une supply chain efficace peut vite devenir un élément différenciant très puissant d’un point de vue stratégique et de fidélisation des clients. Les dirigeants regardent de plus en plus les coûts induits par une expérience clients dégradée plutôt que les coûts directs liés à la supply chain, reprend Maxime Huzar, cofondateur de Spacefill. Reste que ce n’est pas toujours évident de savoir sur quels partenaires s’appuyer et c’est précisément là que nous souhaitons nous positionner : en plus de notre marketplace d’entrepôts, qui met en relation des entreprises recherchant des capacités de stockage avec des exploitants d’entrepôts aptes à les accueillir, nous souhaitons développer nos fonctionnalités de facturation, de mise en place des procédures opérationnelles permettant de s’assurer que les colis sont bien traités… » Créé en 2018, Spacefill a levé 7 millions d’euros à l’automne dernier auprès d’Idinvest, de business angels comme les fondateurs d’un autre acteur du secteur, Transporteon, et de ses investisseurs historiques, La Famiglia et Financière Saint James.
Le fabricant de robots pour entrepôts Exotec a également pris sa part du dynamisme du secteur en bouclant après l’été sa série C de 90 millions de dollars abondée par le nouvel entrant 83North et ses actionnaires historiques, Breega et Iris Capital. « La robotique d’entreposage a été l’un des premiers axes de modernisation suivis par les logisticiens en Europe. C’est ainsi que nous avons vu l’équipe d’Exotec se lancer en 2016 (le tour d’amorçage de l’époque a été mené avec 360 Capital, NDLR), puis ils sont revenus nous voir dès 2018 après avoir signé leurs premiers clients, principalement des distributeurs comme CDiscount et Carrefour, contextualise Julien-David Nitlech, managing partner chez Iris Capital. Dans le domaine du transport et du fret également, nous voyons se développer des solutions de modernisation à l’instar de celle de l’allemand Forto, qui couvre actuellement la ligne Europe/Asie. Nous avons participé il y a quelques semaines à sa levée de 50 millions de dollars aux côtés d’Inven Capital, Rider Global, Northzone, Cherry Ventures, H14 et Maersk. »
D’autres acteurs européens montent en puissance sous le regard des fonds, à l’instar du norvégien AutoStore (automatisation des entrepôts), cédé par EQT à THL Partners dès 2019 après deux ans d’actionnariat, ou de l’espagnol OnTruck, qui a levé 17 millions d’euros l’été dernier auprès de Cathay Innovation, Atomico, Idinvest Partners, Total Carbon Neutrality Ventures et Endeavor Catalyst. « Une solution comme celle d’OnTruck permet d’éviter que les camions roulent à vide, présente Denis Barrier, de Cathay Innovation. Cette optimisation des flux et des stocks a un impact important sur les coûts ainsi que sur les émissions de carbone, dans un souci de sustainability accrue de la chaîne logistique. De même, la capacité à produire en plus petites séries individualisées, que nous voyons se développer en Chine, s’intègre dans cette volonté de pouvoir offrir les produits les plus personnalisés possibles au meilleur coût financier et environnemental. »
D’autres acteurs européens montent en puissance sous le regard des fonds, à l’instar du norvégien AutoStore (automatisation des entrepôts), cédé par EQT à THL Partners dès 2019 après deux ans d’actionnariat, ou de l’espagnol OnTruck, qui a levé 17 millions d’euros l’été dernier auprès de Cathay Innovation, Atomico, Idinvest Partners, Total Carbon Neutrality Ventures et Endeavor Catalyst. « Une solution comme celle d’OnTruck permet d’éviter que les camions roulent à vide, présente Denis Barrier, de Cathay Innovation. Cette optimisation des flux et des stocks a un impact important sur les coûts ainsi que sur les émissions de carbone, dans un souci de sustainability accrue de la chaîne logistique. De même, la capacité à produire en plus petites séries individualisées, que nous voyons se développer en Chine, s’intègre dans cette volonté de pouvoir offrir les produits les plus personnalisés possibles au meilleur coût financier et environnemental. »
Optimiser et sécuriser
Ce souci d’optimisation, avec pour corollaire la capacité à prévoir et planifier, est lui aussi au cœur du business model de plusieurs start-up qui se sont distinguées en 2020. Ainsi, dans le transport de marchandises, Inter Invest Capital a pris une participation minoritaire dans Supervan, positionné sur le transport digitalisé de produits volumineux, à l’occasion d’une levée de 3 millions d’euros. « Dans un secteur traditionnel comme le transport, le digital représente un enjeu clé tant pour améliorer l’expérience utilisateur que pour répondre à des enjeux économiques importants. Pour les professionnels du BTP, principaux clients de Supervan, être capables de trouver en quelques minutes un livreur pour l’approvisionnement en matériaux et équipements volumineux permet d’éviter un arrêt des chantiers pendant plusieurs heures. Du côté des opérateurs logistiques, leur référencement sur la plateforme est un relais commercial supplémentaire en plus des prises de commandes classiques », analyse Benjamin Cohen, associé chez Inter Invest Capital.
Dans le domaine du fret, Shippeo, dont la solution permet aux entreprises de planifier et suivre en temps réel leurs transports de marchandises, a levé 20 millions d’euros au début de l’année 2020 auprès de NGP Capital (ex-fonds de corporate venture de Nokia), d’ETF Partners, de Bpifrance et de Partech. Les mêmes, rejoints par Battery Ventures, lui ont apporté 32 millions de dollars supplémentaires il y a quelques jours seulement. Entre ces deux tours, la start-up a annoncé l’acquisition du lyonnais oPhone. « Il nous semble que la crise du Covid va avoir un fort impact sur ces enjeux d’optimisation des flux de biens, car ils souffrent d’une criticité plus forte dans ce contexte. Leur principale déclinaison sera de l’applicatif afin de rendre utiles toutes les données dont disposent déjà les opérateurs logistiques, avec un enjeu important d’interopérabilité de ces logiciels avec les plateformes comme Salesforce ou SAP qu’utilisent déjà bon nombre d’entreprises. Cela passera aussi par la connectivité accrue des objets : par exemple, une solution comme Shippeo assure le suivi des camions, mais l’important est maintenant de descendre au niveau des palettes qu’ils contiennent. L’avènement de la 5G devrait y aider, explique Julien-David Nitlech, chez Iris Capital. L’étape suivante sera la sécurisation de l’ensemble de ces dispositifs à trois niveaux : des outils logistiques physiques (entrepôts, flottes de véhicules…), des systèmes avec la prévention et la lutte contre les cyber-attaques et enfin de l’authentification et de la traçabilité des marchandises. Dans ce domaine, nous voyons naître des technologies de blockchain appliquée à la logistique comme Tilkal (a levé 3,5 millions d’euros auprès de Breega et Ventech en 2019, NDLR) ou Wakeo (50 Partners, Techstars et des business angels lui ont apporté 1,8 million d’euros en 2019, NDLR) qui changent drastiquement la donne. »
Ce souci d’optimisation, avec pour corollaire la capacité à prévoir et planifier, est lui aussi au cœur du business model de plusieurs start-up qui se sont distinguées en 2020. Ainsi, dans le transport de marchandises, Inter Invest Capital a pris une participation minoritaire dans Supervan, positionné sur le transport digitalisé de produits volumineux, à l’occasion d’une levée de 3 millions d’euros. « Dans un secteur traditionnel comme le transport, le digital représente un enjeu clé tant pour améliorer l’expérience utilisateur que pour répondre à des enjeux économiques importants. Pour les professionnels du BTP, principaux clients de Supervan, être capables de trouver en quelques minutes un livreur pour l’approvisionnement en matériaux et équipements volumineux permet d’éviter un arrêt des chantiers pendant plusieurs heures. Du côté des opérateurs logistiques, leur référencement sur la plateforme est un relais commercial supplémentaire en plus des prises de commandes classiques », analyse Benjamin Cohen, associé chez Inter Invest Capital.
Dans le domaine du fret, Shippeo, dont la solution permet aux entreprises de planifier et suivre en temps réel leurs transports de marchandises, a levé 20 millions d’euros au début de l’année 2020 auprès de NGP Capital (ex-fonds de corporate venture de Nokia), d’ETF Partners, de Bpifrance et de Partech. Les mêmes, rejoints par Battery Ventures, lui ont apporté 32 millions de dollars supplémentaires il y a quelques jours seulement. Entre ces deux tours, la start-up a annoncé l’acquisition du lyonnais oPhone. « Il nous semble que la crise du Covid va avoir un fort impact sur ces enjeux d’optimisation des flux de biens, car ils souffrent d’une criticité plus forte dans ce contexte. Leur principale déclinaison sera de l’applicatif afin de rendre utiles toutes les données dont disposent déjà les opérateurs logistiques, avec un enjeu important d’interopérabilité de ces logiciels avec les plateformes comme Salesforce ou SAP qu’utilisent déjà bon nombre d’entreprises. Cela passera aussi par la connectivité accrue des objets : par exemple, une solution comme Shippeo assure le suivi des camions, mais l’important est maintenant de descendre au niveau des palettes qu’ils contiennent. L’avènement de la 5G devrait y aider, explique Julien-David Nitlech, chez Iris Capital. L’étape suivante sera la sécurisation de l’ensemble de ces dispositifs à trois niveaux : des outils logistiques physiques (entrepôts, flottes de véhicules…), des systèmes avec la prévention et la lutte contre les cyber-attaques et enfin de l’authentification et de la traçabilité des marchandises. Dans ce domaine, nous voyons naître des technologies de blockchain appliquée à la logistique comme Tilkal (a levé 3,5 millions d’euros auprès de Breega et Ventech en 2019, NDLR) ou Wakeo (50 Partners, Techstars et des business angels lui ont apporté 1,8 million d’euros en 2019, NDLR) qui changent drastiquement la donne. »
Plateformes et nouveaux marchés
Dans un marché mondial de plusieurs centaines de milliards de dollars, il y a clairement de la place pour plusieurs acteurs, dont certains sont engagés dans une course à la taille pour s’imposer. « Dans le domaine de l’affrètement par exemple, nous voyons un acteur comme Redspher, participation d’Eurazeo, qui a développé en interne ses propres outils digitaux, note Florent Haïk, managing partner chez Raphaël Financial Advisory. Sa marketplace Easy4Pro met ainsi en relation des chargeurs et des transporteurs routiers. Cette volonté de créer des plateformes couvrant l’ensemble des moyens de transport s’affirme chez plusieurs opérateurs. »
D’autres axes de développement attirent l’œil des investisseurs, par exemple du côté des infrastructures. « Nous investissons également dans l’explosion des services urbains pour les acteurs de la livraison du dernier kilomètre, comme des bornes intelligentes d’échange de batteries pour scooters électriques utilisés par des livreurs ou des stations de recharge de véhicules électriques pour les e-commerçants, précise Matthieu Bonamy, chez Idinvest. Ils permettent d’organiser des moyens de transport électriques compatibles avec les enjeux de réduction des émissions de CO2 dans les villes. Là encore, cela permet à des petits opérateurs de concurrencer les groupes intégrés sans créer leur propre flotte de transport. »
Enfin, à court ou moyen terme, une autre technologie pourrait bien rebattre une nouvelle fois les cartes du secteur : les drones. Selon le fonds spécialisé Levitate Capital, la logistique a le potentiel pour devenir, d’ici à 2030, le premier marché pour ces véhicules téléguidés. Son estimation de base s’élève à 33 milliards de dollars, avec une borne basse à 7,1 milliards et un scénario agressif à 47 milliards. Sans surprise, Amazon a déjà flairé le bon coup.
Dans un marché mondial de plusieurs centaines de milliards de dollars, il y a clairement de la place pour plusieurs acteurs, dont certains sont engagés dans une course à la taille pour s’imposer. « Dans le domaine de l’affrètement par exemple, nous voyons un acteur comme Redspher, participation d’Eurazeo, qui a développé en interne ses propres outils digitaux, note Florent Haïk, managing partner chez Raphaël Financial Advisory. Sa marketplace Easy4Pro met ainsi en relation des chargeurs et des transporteurs routiers. Cette volonté de créer des plateformes couvrant l’ensemble des moyens de transport s’affirme chez plusieurs opérateurs. »
D’autres axes de développement attirent l’œil des investisseurs, par exemple du côté des infrastructures. « Nous investissons également dans l’explosion des services urbains pour les acteurs de la livraison du dernier kilomètre, comme des bornes intelligentes d’échange de batteries pour scooters électriques utilisés par des livreurs ou des stations de recharge de véhicules électriques pour les e-commerçants, précise Matthieu Bonamy, chez Idinvest. Ils permettent d’organiser des moyens de transport électriques compatibles avec les enjeux de réduction des émissions de CO2 dans les villes. Là encore, cela permet à des petits opérateurs de concurrencer les groupes intégrés sans créer leur propre flotte de transport. »
Enfin, à court ou moyen terme, une autre technologie pourrait bien rebattre une nouvelle fois les cartes du secteur : les drones. Selon le fonds spécialisé Levitate Capital, la logistique a le potentiel pour devenir, d’ici à 2030, le premier marché pour ces véhicules téléguidés. Son estimation de base s’élève à 33 milliards de dollars, avec une borne basse à 7,1 milliards et un scénario agressif à 47 milliards. Sans surprise, Amazon a déjà flairé le bon coup.